Un projet très ambitieux : il serait intéressant de lire des témoignages sur l'utilisation de cette méthode. L'auteur y fait une remarque prémonitoire : "Parmi tant et de si diverses langues parlées en Orient, la langue turque [...] est peut-être la seule dont notre alphabet puisse, avec quelque succès, figurer la prononciation."
Vocabulaire oriental, français-italien, arabe, turc et grec : composé pour la seule prononciation par L. Victor Letellier, membre de la Société asiatique de Paris. Ouvrage destiné à notre Armée d'Afrique, à notre Marine dans le levant, aux Voyageurs, aux Négociants et aux Agens français en Alger, en Turquie et dans toute la Grèce. Paris, chez l'auteur, rue de la planche, n°9, Faubourg Saint-Germain, et chez A. Guyot et Scribe, Barrois, et Dondey-Dupré, 1838, 239 pages
Disponible sur Google books.
L. Victor Letellier offre une méthode de langue facile à utiliser pour ceux qui voyagent en Méditerranée. Elle concerne l'arabe, le turc, le grec qui sont indispensables pour les affaires. Toutes ces langues sont transcrites en caractères latins, quitte à modifier certaines prononciations.
L. Victor Letellier était membre de la Société Asiatique, il est aussi l'auteur de deux ouvrages concernant directement ou indirectement la Turquie :
- Choix de fables, traduites en turk par un effendi de Constantinople, et publiées avec une version française et un glossaire... Paris, Librairie orientale de Dondey-Dupré et fils, 1826
- Voyage et itinéraire à Constantinople, chez les Lazzes, en Géorgie, dans une partie de la Perse et de la Russie, de 1826 à 1833,... Paris, A. Bertrand, 1840
- L'Artisan, moniteur ouvrier de Paris et des départements... (1re-2e année), Paris, 1842-1843
- L'Impitoyable, journal de tous les abus publics... N° 1, Paris, 1848
- Première lettre du citoyen Victor Letellier, fondateur-rédacteur en chef de "l'Impitoyable"... au général Cavaignac, 1848
- La Constituante, satire, Paris, Dentu, 1849
- Une Année à Dunkerque. Guide pour tout le monde. Dunkerque, I. Leys, 1850
- Lettres à ma fille sur l'histoire d'Angleterre, en vers et en prose. Paris, Ledoyen, 1858 (2e édition, 1861)
- Guide-manuel de photographie pratique sur collotion. Paris, Desloges, 1860
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Résumé de l'introduction
La conquête de l'Algérie date de quelques années, les rapports avec l'empire ottoman de plusieurs siècles, mais il n'existe pas d'ouvrage pratique.
Il est difficile de voyager dans le Levant sans connaître les langues qui y sont parlées. On est à la merci d'intermédiaires parfois peu scrupuleux.
Il faut qu'un voyageur puisse exprimer ses besoins de base. C'est le but de cet ouvrage qui permet de se familiariser avec ces langues : arabe, turc, grec, italien sans connaître leurs alphabets.
On y trouve les mots, les locutions et les phrases les plus nécessaires dans la prononciation la plus proche possible.
Il s'agit des langues courantes et non littéraires. Tous les mots sont accompagnés d'exemples, les verbes sont accompagnés des formes conjuguées les plus usitées.
La grammaire de chaque langue est succintement présentée : principes généraux, déclinaisons, conjugaisons.
L'italien a été ajouté au français car il est très utilisé dans l'Orient.
Présentation de la transcription phonétique
OBSERVATIONS
Indispensables à lire pour se servir avec fruit du présent ouvrage.
Le lecteur, quelque étranger qu'il puisse être aux langues de l'Orient, soupçonne d'avance les dissemblances que leurs divers alphabets peuvent offrir avec le nôtre ; celui qui a quelque connaissance des idiomes de l'Europe sait déjà que nombre de lettres , de ces divers idiomes n'existent pas dans le nôtre ; que la jota espagnole, par exemple, ou le ch des Allemands, que le c italien, le ièri des Russes et le th anglais n'ont en français aucun équivalent ; que notre e muet à nous-mêmes, que plusieurs de nos diphtongues et toutes nos nasales sont, à leur tour, inrendables dans les alphabets ci-dessus ; il croira donc facilement que la transcription à lui offerte dans ce livre ne peut être entièrement parfaite ; il comprendra les peines que cette transcription a dû m'occasionner, et le besoin que j'ai eu d'adopter, comme le font la plupart des orientalistes, divers signes et caractères pour appeler l'attention sur certaines lettres que l'alphabet français était impuissant à représenter.
Parmi tant et de si diverses langues parlées en Orient, la langue turque, celle au moins de Constantinople, est peut-être la seule dont notre alphabet puisse, avec quelque succès, figurer la prononciation ; mais il n'en est pas de même de la langue arabe, surtout de celle d'Alger, toute gutturale, tout emphatique, et, parfois, de la langue grecque, qui, indépendamment de certaines lettres à elle particulières, offre encore à celui qui veut parler une difficulté réelle, celle de l'accentuation, que des règles ne feraient pas toujours comprendre, et qu'il convenait ici d'indiquer le plus souvent, parce que, de son inobservance ou de sa fausse application, le discours peut devenir, en certains cas, ou équivoque ou obscur.
Voici donc, pour l'intelligence de ce livre, quelques observations que le lecteur est prié de bien noter dans sa mémoire :
1° Aucune lettre, dans ce Vocabulaire, ne sera nasale ou entièrement muette; les consonnes devront sonner comme si elles étaient redoublées ou suivies d'un e muet : ainsi, bat, èr, it devront être prononcés comme le seraient en français batt, èer, itt, ou mieux encore bate, ère, ite, ete ; an, in, on, un, comme ane, ine, one, une.
E non accentué ne sera jamais insensible, comme dans nos mots père, rame; il conservera constamment le son qui lui est affecté dans les monosyllabes me, te, le, ete.
2° S conservera le son qui lui est propre dans notre langue au commencement des mots, et ne prendra jamais celui de z.
3° Gn devront se prononcer détachés, comme dans le mot stagnation. Ecrits en italiques, ce qui se rencontrera fort rarement, et seulement à la colonne du grec, ils se prononceront, par exception, comme dans notre mot campagne.
4° Gue, gui se prononceront comme dans les mots guérir, guirlande.
5° Ia, ie, io, iu devront être articulés vivement et d'une seule émission de voix, comme dans les mots amitié, opium, etc.
6° Kh, à la colonne de l'arabe et à celle du turc, représentent une lettre dont la prononciation dure, prise dans la gorge, est à peu près identique avec celle du ch allemand ou de la jota espagnole. Dans la colonne du grec, kh représentent la consonne (khi), laquelle fait entendre la prononciation ci-dessus quand elle précède une des voyelles a, o, u; mais se prononce beaucoup plus doucement, à peu près comme notre l mouillé ou le gl des Italiens, quand elle est suivie des voyelles e ou i.
7° H, soit initial, médial ou final, indique toujours une aspiration, non comme en français, où l'aspiration n'existe que de nom, mais comme en allemand dans le mot haben, par exemple.
8° Hh, au commencement ou dans le cours d'un mot, exigent une aspiration plus forte encore que la précédente ; à la fin d'un mot, la prononciation doit être jetée, puis immédiatement mourante. J'inviterai le lecteur à bien observer cette prononciation dans la bouche même de quelque naturel : il ne saurait la comprendre autrement.
9° Gh tiennent la place du ghayn arabe, du ghamma grec, quelquefois même du guièf turc. Ces deux lettres font entendre un son à peu près semblable à celui ne notre r grasseyé comme à Paris.
10° Q répond au qaf, kiaf arabe ; il est guttural dans la colonne destinée à cette langue, mais ne diffère aucunement du k français dans la colonne du turc.
11° N en caractère italique, à la colonne du turc seulement (ce qui, dans le cours de ce volume, ne se rencontrera que peu de fois), affecte un son nasal.
12° Th, dh, qui sont fréquents dans la colonne du grec, tiennent la place de thita et de dhèlta; le son de th est parfaitement identique avec celui de th anglais; dh ont avec th la plus grande affinité, à la différence que le d se sent dans le dhelta et le t dans le thita.
13° X représente le xi grec; il fait entendre la même prononciation qu'en français.
14° L'apostrophe (') est le signe de convention en usage parmi les orientalistes pour indiquer la présence du ayn arabe, lettre dont la prononciation généralement dure, gutturale, suspensive, inconnue peut,être à tous les alphabets, ne saurait être expliquée par aucune analogie ni fidèlement rendue par aucun étranger. Selon donc que cette apostrophe se trouvera précéder ou suivre une voyelle, le son particulier au ayn devra être entendu avant ou après cette voyelle; et, dans mes indications, je m'en suis moins rapporté à l'orthographe qu'à mon oreille.
15° Le signe suivant -, placé dans le cours d'un mot est destiné à empêcher une liaison que l'habitude de l'épellation française amènerait inévitablement, ou bien à prévenir le lecteur que les deux syllabes qu'il sépare se doivent prononcer avec quelque suspension et avec une espèce d'aspiration.
16° Ce signe * mis après un mot a pour but de faire connaître qu'il y a eu impossibilité pour l'auteur de rendre d'une manière satisfaisante la prononciation de ce mot.
17° Une dernière observation est relative à de certaines voyelles portant au,dessous d'elles un accent, et que l'on rencontrera très fréquemment dans la colonne du grec ; c'est par elles que j'ai entendu indiquer au lecteur l'accentuation dont j'ai parlé plus haut, si importante dans le discours. C'est donc sur les voyelles ainsi accentuées que la voix devra porter, que l'accent devra se faire sentir.
Nonobstant les observations qu'on vient de lire et le soin toujours scrupuleux que j'ai apporté dans mon travail le recommanderai instamment au lecteur qui, à l'aide de ce livre, voudra se former à la conversation , de se faire préalablement prononcer par divers naturels, ou même par quelque Européen suffisamment exercé dans la pratique de ces divers idiomes, celles des lettres ci,dessus dont les explications n'ont pu lui éclaircir ou lui enseigner la valeur ; une fois la prononciation de ces lettres entendue, comprise et bien gravée dans sa mémoire, je ne crains pas de l'assurer que ce livre, tout abrégé qu'il est, lui sera, dans ses voyages, de la plus grande utilité ; et qu'il contribuera puissamment et vite à le familiariser avec les langues usuelles, si négligées chez nous, et pourtant si nécessaires.
Quelques exemples
Français-Italien |
Arabe |
Turc |
Grec |
ORIENT. oriente. levante 1 j'ai beaucoup voyagé en Orient. Ho molto viaggiato nel levante 2 Les Orientaux ont un usage. Orientali hanno un costume.. |
Cherq 1 sefert ketir fecheherq 2 el mechraqiyè'andchum 'adet... |
Gun doghouch 1 tchoq guèzdum gun doghouch tarafenda. 2 gun doghouch tarafendaki olan adamlaren adeti var... |
Anatoli. f. ne se dit que pour l'Asie 1 etaxidhevsa is ton lévanté 2 i katiki tou lévanté sinitbizoun... |
PARDON ! scusate PADONNER, perdonare 1 pardonnez-moi PARENT. parente ... PARESSE. pigrizia PARESSEUX. poltrone. ... PARLER. parlare. 1 parlez-vous français ? parlate il francese |
Esmahli Semah 1 esmahli Habib. qerib. pl abbab. aqrah qerayb ... Adez Edzen. kèslan. ... Tkéllem. tahddet 1 tetkéllem fransawwi ou bel fransis ? |
Aff edèrsiniz Aff etmèk, baghechlamaq 1 aff ediniz bana Hesem khesem. aqraba ... tèmbèllik tèmbèl ... laqerdè ètmèk. seuylémèk. 1 fransezdja seuylèrmiseniz ou laqerde édèrmiseniz ? |
Khorisé mè Sinkhorô 1 sinkhorisaté mi Singhènis. patir. père ... Oknirya. amèlis. tembelia. f. Amèlis. tembèlis. adj. okniros ... Omilô 1 omilité frantsezika ou ghalika ? |
Vert. adj. verde 1 vert de gris. Verderame VERTU (propriété). vigore VETEMENT. veste |
Akhdar. f. khadra. pl. khder 1 djenzar. vul. adyt (rouille) Qowwè Lebès. lbès |
Ièchil 1 us. rouille. pass Qouvvèt Espab. rouba |
Prasinos, i, on. 1 skouria. f. Dhinamis.f. Boukhon. èndhima. forèma. n. |