Selge, dont les ruines se trouvent au Nord-Est d'Antalya, à près de 1000 mètres d'altitude, était une cité de Pisidie, rivale de Termessos. Comme elle, elle abrite les restes d'un beau théâtre.
Des maisons sont toujours installées à proximité des ruines, à quelques mètres du théâtre dont ceratins gradins se sont effondrés comme on le voit c-dessous.
Vue du théâtre et de la montagne
Extrait de Charles Félix M. Texier , Asie Mineure, description géographique, historique et archéologique..., 1862
"Selgé, ville grecque, colonie de Lacédémone, était située dans la vallée supérieure de l'Eurymédon, sur le versant méridional du Taurus. D'après de vagues récits des indigènes, Aruodell avait déjà marqué la place de cette ville au village de Serghé au sud de Buliasan, et a une journée de marche au nord d'Aspendus, en suivant la vallée de l'Eurymédon. M. Schoenhorn a déterminé l'emplacement, de Selgé au pied de la montagne de Bouz bouroun, a une hauteur de 1250 mètres au-dessus de la mer, au village de Serghé ou Surk. En partant de Buliasan il descend dans la vallée de l'Eurymédon et par une route très-difficile, il monte en serpentant jusqu'au plateau ou s'élèvent les ruines de Selgé au milieu desquelles sont bâties les maisons du village.
Les Selgiens, dit Strabon, comptaient au nombre des peuples les plus puissants de la Pisidie ; il nomme ensuite les Pednilessiens, qui en étaient limitrophes; leur pays était soumis à différents tyrans comme les deux Cilicies. La vie des Pisidiens se passait dans la maraude et le pillage. D'après une ancienne tradition, les Léléires étaient venus se joindre à eux, et s'étaient installés dans leurs montagnes : leurs moeurs de peuples vagabonds s'accordaient ensemble. Les Pisidiens entourés à l'est et au nord par des peuples qui menaient une vie régulière, s'étaient plus rapprochés des Ciliciens qui étaient portés aux expéditions de piraterie.
Une ville autonome
Selon Strabon, Chalcas fut le fondateur de Selgé; cette ville était renommée par la sagesse de son gouvernement et sut conserver jusqu'à la lin de l'empire sa liberté et son autonomie, elle pouvait mettre sous les armes jusqu'à vingt mille combattants. Les montagnes produisaient toutes sortes de fruits; l'arbre du Styrax dont les branches servaient à faire des hampes de lance et le suc, un parfum très-recherché, y croissait abondamment.
Les routes, pour arriver à Selgé étaient des plus difficiles ; la ville, située entre le Cestrus et l'Eurymédon, était défendue par des précipices infranchissables. Aussi lorsqu'Alexandre traversa la Pisidie, il se contenta d'une ambassade des Selgiens, qui vinrent l'assurer de leur amitié.
Achaeus, grand-oncle, d'Antiochus, s'empara du pouvoir suprême dans le sud de l'Asie Mineure, il fut souverain sans conteste comme Crésus, de la Lydie et des pays limitrophes. Les Selgiens ayant déclaré la guerre à Pednilessus, cette dernière ville envoya demander du secours à Achaeus, qui envoya sur-le-champ un corps de six mille hommes et cinq cents chevaux, sous le commandement de Garsyeris.
Les Selgiens gardaient les défilés, et Garsyeris, ne se trouvant pas en force pour les enlever, se rappela la ruse d'Alexandre devant Termessus; il feignit de battre en retraite, et les Selgiens rentrèrent dans leur ville. Garsyeris ayant laissé un officier nommé Phayllus pour garder les défilés, descendit rapidement en Pamphylie et réclama des villes de Perga, Aspendus et Sidé des renforts qu'on n'osa pas lui refuser de crainte de déplaire à Achaeus. Pendant ce temps, les Selgiens continuaient le siège de Pednilessus. Ils avaient dirigé avec succès une attaque contre le camp de Garsyeris; mais les Pednilessiens ayant fait une sortie opportune, l'armée grecque reprit l'avantage et les Selgiens furent repoussés dans leur ville, après avoir éprouvé de grandes pertes. Ils songèrent alors à traiter, et chargèrent de leurs propositions Logbasis, un de leurs premiers citoyens. Il avait déjà brigué l'autorité suprême, et conçut l'espérance d'en être investi par Achaeus. Logbasis, trahissant ses concitoyens, se proposait d'introduire Garsyeris dans la place. Le général grec devait diriger ses troupes vers le Cesbédium, ou temple de Jupiter, qui était dans l'acropole, tandis qu'Achaeus lui-même devait marcher sur la ville. Les Selgiens, avertis à temps, par un berger, de la trahison de Logbasis, entrèrent dans sa maison, qui étaient pleine de conjurés, les massacrèrent tous, et envoyèrent ensuite des renforts au Cesbédium. Garsyeris, voyant ses plans découverts, n'osa pas tenter une attaque. Les Selgiens envoyèrent néanmoins des députés à Achaeus, et conclurent la paix aux conditions suivantes : les prisonniers Pednilessiens seraient rendus, la ville payerait immédiatement quatre cents talents et trois cents un peu plus tard, à ces conditions Selgé conserva sa liberté.
Le théâtre
Les ruines de l'ancienne Selgé sont tout à fait conformes au récit de Polybe; il faut franchir pour arriver à la ville plusieurs défilés. La ville était construite sur la pente d'une colline dominée par le haut sommet du Bouz bouroun. Sur une esplanade de rochers s'élève un grand temple dont la longueur est d'environ trente-deux mètres et la largeur de seize. L'Area est encore couverte d'un dallage; on reconnaît de grandes substructioni avec des passages voûtés, et quatre colonnes corinthiennes cannelées s'élèvent sur la façade; elles ont un mètre de diamètre. On reconnaît dans cet édifice le temple de Jupiter ou Cesbédium mentionné par Polybe; non loin du temple, sur l'acropole, on voit les ruines d'une église : Selgé fut en effet un siège épiscopal de la Pamphylie.
La partie la mieux fortifiée de la ville est du côté de l'ouest : c'est aussi celle qui a le plus souffert; le théâtre est bâti en grands blocs de poudingue comme celui d'Aspendus, près de là sont les ruines du stade dont l'arène est envahie par les cultures, les maisons du village sont appuyées sur les colonnes d'un grand portique, et la nécropole que 1'on retrouve à l'extrémité renferme encore plusieurs sarcophages; au sud de la ville est une profonde vallée au fond de laquelle coule l'Eurymédon."