Aphrodisias, ancienne capitale de la Carie, est un site original à plusieurs titres : ce n'est qu'au IIe siècle av. J.-C. que la ville s'est développée, de nombreux monuments ont été assez bien préservés et le site n'est pas envahi par le tourisme.
"Aphrodisias (Gheira), ville libre de la Carie (Anatolie) , vers le nord-est. Elle était l'une des principales de cette contrée. Elle avait d'abord porté le nom de Megalopolis. On y remarquait un temple de Vénus [Aphrodite]. Elle n'offre plus que des ruines."
extrait de Dufau et Guadet, Dictionnaire universel abrégé de géographie ancienne comparée…, 1820
- la plus grande partie du site a été fouillée tardivement, donc aucun des monuments ou sculpture n'a été pillé et emmené à l'étranger comme c'est le cas à Pergame ou à Ephèse
- certains monuments ont été très bien préservés grâce à la destruction "rapide" et presque propre par des tremblements de terre et ont pu être restaurés. Certains matériaux sont restés en place et n'ont pas été pillés ou réutilisés.
- de nombreuses sculptures ont été récupérées dans les murs d'enceinte construits avec les restes des monuments effondrés
- des monuments originaux que l'on ne voit pas ailleurs y sont visibles : le tétrapylon, une très belle porte monumentale dans la ville, le sébasteion ou Augusteum, temple dédié au culte des empereurs romains et dont 70 des 190 bas-reliefs sont exposés dans le musée, le stade, un des plus grands (270 mètres, 30000 sièges) et plutôt bien conservé, le bouleuterion également bien préservé, le temple d'Aphrodite, le théâtre de 7000 places construit par l'affranchi Caius Julius Zoilos au Ier siècle avant J.-C. etc.
Pour effacer la référence à la déesse de l'amour, la ville fut rebaptisée Stavropolis (ville de la croix) et devint le siège d'un évêché. Au XVe siècle, elle fut abandonnée et il ne resta qu'un village recouvrant les ruines.
C'est l'archéologue turc Kenan Tevfik Erim (1929-1990) qui, à partir de 1961, consacra sa vie à Aphrodisias ; il y est enterré.
Les fouilles et les travaux continuent activement.
Photographies : juillet 2015, © Julien Revesz
Temple d'Aphrodite
Il fut construit au Ier siècle avant J.-C. par l'affranchi Caius Julius Zoilos et transformé en basilique chrétienne au Ve siècle.
Le bouleuterion
Le stade
Le tetrapylon
Il date du IIe siècle après J.-C.
Le Sebasteion
L'agora (Sud)
Des travaux y sont en cours en ce mois de juillet 2015.
Le musée
Il abrite une très belle collection de sculptures. Aphrodisias était réputée dans tout le bassin méditerranéen pour le talent de ses sculpteurs.
Aphrodisias en 1837
Extrait de B. Poujoulat, Voyage dans l'Asie mineure, en Mésopotamie a Palmyre, ... 1840
[nous avons ajouté des intertitres]
"Une heure de chemin, depuis ce dernier village, nous a conduits à Geïra, village composé de quarante cabanes, bâties parmi les ruines de l’antique Aphrodisias, ville de Vénus.
Nous commencerons notre description d’Aphrodisias par des remparts modernes, que des mains barbares ont construits avec des colonnes cannelées, des chapiteaux, des corniches ornées de guirlandes et de grappes de raisins. Sur la partie extérieure des fortifications, au sud-est, on remarque des bas-reliefs qui sont entrés dans la construction des murailles. Ces bas-reliefs représentent d’amoureuses allégories. Le dieu Cupidon, armé de sa flèche redoutable, dompte les hommes les plus farouches, les animaux les plus terribles: d’un côté des gladiateurs et des guerriers; d’un autre côté, des taureaux et des lions. Le marbre est entouré de guirlandes gracieusement entremêlées de charmantes petites têtes d’amours. Ces bas-reliefs , où l’art grec se montre dans sa plus remarquable pureté, présentent comme un poème érotique écrit sur le marbre. Ces admirables fragments de sculpture ont certainement appartenu au temple de Vénus, dont nous parlerons bientôt.
Le stade
Au midi est une magnifique porte en marbre blanc, sur le fronton de laquelle est une inscription grecque toute mutilée. Sur les deux côtés des façades extérieures et intérieures sont des statues d’environ trois pieds de hauteur; ces statues ont des ailes déployées et représentent peut-être des génies prêts à s’élancer à travers l’espace. Au nord de cette porte, dans l’enceinte des murailles, est un stade d’une surprenante grandeur; tous les gradins existent encore ainsi que les deux arcades par où les gladiateurs entraient dans l’arène. Des broussailles croissent entre les jointures des gradins, et, mêlant leur verdure à la mousse amassés par le temps, semblent vouloir dérober ce monument aux outrages de l’homme.
Le temple d'Aphrodite
Dix-huit colonnes cannelées sont restées debout au milieu de l’enceinte d’Aphrodisias ; elles ont quatre pieds de diamètre ; c’est tout ce qui reste du temple de Vénus, tant admiré par le peuple de l’antique Ionie. Des cigognes ont bâti leur nid sur le faîte des chapiteaux ; elles voltigeaient de colonne en colonne, de ruine en ruine ; le bruit de leurs ailes, le choc de leur bec sur les débris du monument, remplaçaient les hymnes qui jadis retentissaient en l’honneur de la mère des amours. A quarante-cinq pas de ces belles ruines, s’élèvent douze colonnes d’une moindre dimension que celles du temple de Vénus. Les ornements des entablements de ces colonnes représentent des guirlandes et des grappes de raisin ; ils sont semblables à ceux que nous avons indiqués tout à l’heure en nous promenant autour des remparts. Il est permis de croire, d’après ces emblèmes, que ces colonnes ont appartenu à un temple de Bacchus [ce n'est pas le cas]. Les douze colonnes correspondent à des tronçons, à des fûts brisés ; il est facile de reconnaître qu’il y avait là trois rangs de colonnes, dont trente sur chaque rang. A l’extrémité de ces colonnades, apparaît un portique bien conservé. Les ruines d’Aphrodisias couvrent une vaste étendue; elles présentent au voyageur des débris dont on ne saurait préciser la destination primitive."