Kanlica (Kanlidja), situé sur la rive asiatique du Bosphore, au nord du pont Fatih Sultan Mehmet fut d'abord un petit village grec nommé Glanos, avant de devenir un lieu de résidence apprécié des stanbouliotes, réputé pour son yaourt.
"Les quelques kilomètres qui séparent la ville d'Anadolou-Hissar, les gourmets n'hésitent pas à les franchir le jour où ils ont envie de savourer des tripes à la mode de Turquie ou des pieds de mouton. En contre-bas du château, se cache un traiteur fameux, encore que modeste d'apparence, dont ces plats sont la spécialité. Mais s'il s'agit de yoghourt, on pousse jusqu'à Kanlidja, qui en débite de délicieux, enclos dans des bols de cristal et pareil, sous leur enveloppe de cellophane, à quelque crème de beauté. Déjà, au XVIIème siècle, Evliya Tchélébi, cet intrépide voyageur turc qui, né à Istanbul, a si minutieusement décrit sa ville natale, vantait dans son Seyahatnamé le yoghourt et le lait de Kanlidja.
Pour en comprendre l'excellence, il n'est d'ailleurs que de voir les pâturages éparpillés dans cette région du Bosphore, sur les hauteurs, étendues de verdure où broutent tout le jour, à l'ombre des cyprès et des pins parasols, des vaches opulentes et de lourdes brebis. On y accède par d'étroits sentiers bordés de fermes, qui fleurent le fumier et le bétail, et résonnent de hardis coquericos. L'on y entend aussi s'égosiller d'un rire incessant les fontaines du village. A Kanlidja, l'on en rencontre une à chaque pas. Fontaines sculptées de cyprès, de rosaces, ou plastronnées de faïences; fontaines carrées, fontaines oblongues..."
extrait de Gentille Arditty-Fuller, Plaisir d'Istanbul, Hachette, 1900
Le Bosphore aux environs de Kanlidja
Cette carte postale fut envoyée depuis le village de Lychna dans l'île de Lemnos le 9 janvier 1916 par le soldat français Anatole R.
Cette île devenue grecque en 1912, après les guerres balkaniques, servit de base aux alliés qui essayaient de prendre le détroit stratégique des Dardanelles.
Cette campagne sanglante se termina à la fin de l'année 1915 comme l'indique le soldat sur cette carte :
"Nous avons été une dizaine de jours sans aucune nouvelle de France, je crois que la correspondance était arrêtée à cause des derniers événements qui se passent par ici, vous savez sans doute que nous avons complètement abandonné les Dardanelles."
La carte, de qualité assez médiocre, fut imprimée en Grèce, au Pirée par G. N. Alexakis