Murat II était fils de Mehmet Ier, qui, en mourant, fit appeler son grand vizir et le conjura, au nom de Dieu et du prophète, par le pain et le sel qu'il lui avait donnés, de placer sur le trône ce prince, l'aîné de ses enfants, et qui n'était âgé que de 18 ans ; c'était en 1421. Ses deux autres fils avaient, l'un huit ans, l'autre sept ; Mehmet les mit sous la tutelle de l'empereur grec Manuel Paléologue, dans la crainte que le nouveau sultan ne les fît étrangler, selon la politique barbare des princes turcs. En vain Manuel réclama ses droits de tuteur ; le monarque ottoman lui fit dire que la loi du prophète défendait aux Musulmans de confier l'éducation de leurs enfants aux cabours ou giaours (chiens, perfides, infidèles) ; c'est le nom sous lequel les Turcs désignent les chrétiens. De nouvelles guerres éclatèrent à cette occasion. Murat II fit périr un des pupilles, l'autre fut sauvé par un grand de la cour. 
Dès le commencement de ce règne parut un compétiteur qui se disait Mustafa, fils de Beyazit, successeur de Murat Ier. Appuyé d'abord par l'empereur grec, mais bientôt trahi et abandonné, Mustafa s'était réfugié à Gallipoli, sur une barque, avec quatre domestiques seulement. Attaqué par les soldats de Murat II, sa résistance ne pouvait être longue il fut pris, chargé de chaînes et pendu comme un imposteur. Pour se venger de la guerre que lui avait suscitée Manuel, le sultan marcha contre Constantinople à la tête d'une armée de cent mille hommes. Ce fut au siège de cette ville que les Grecs connurent pour la première fois l'usage du canon. Ni eux ni les Turcs n'avaient encore adopté cette invention meurtrière, pratiquée depuis quatre-vingts ans chez toutes les autres nations de l'Europe. Malgré les dévastations causées par ces terribles machines, malgré le nombre des forces rassemblées devant la ville impériale, Murat fut obligé d'en lever le siége pour courir au secours de ses états, que menaçait son frère, le dernier des fils de Mehmet Ier. Ce jeune prince, qui avait déjà une fois échappé à la mort, fut bientôt arrêté dans son attaque inconsidérée. Murat le fit étrangler en sa présence. 

Les Vénitiens, devenus puissants par suite de leurs entreprises maritimes, et maîtres d'une partie de la Grèce, avaient acheté de l'empereur d'Orient la ville de Thessalonique. Murat leur fit la guerre, dévasta l'ile de Zante, qui leur appartenait, soumit la Morée, imposa un tribut à Jean Paléologue, assiégea Thessalonique, la prit d'assaut, et la livra au pillage. Cette ville, riche, vaste, célèbre par son commerce et par ses monuments, fut dépeuplée et détruite en un jour. Cependant Murat y envoya plusieurs familles des environs, et permit à un petit nombre de ses citoyens d'y rentrer, en leur faisant payer une rançon considérable. Il n'accorda qu'une église aux chrétiens; toutes les autres furent converties en mosquées, et devinrent la propriété des Turcs. Après avoir forcé les Vénitiens à la paix, étouffé la rébellion de son beau-frère, Karaman-Ogli, Murat tourna ses armes contre la Hongrie, et trouva dans le fameux Jean Huniade un adversaire digne de lui. Le général hongrois battit plusieurs fois le sultan. La guerre continua quelques années avec des succès divers et se termina par le traité le plus solennel que les chétiens et les musulmans eussent jamais conclu ensemble. Ladislas et Murat jurèrent la paix, l'un sur l'Évangile, l'autre sur le Coran ; celui-ci rendit la Serbie, et promit de ne pas pousser plus loin ses conquêtes. Murat ll, très attaché aux pratiques de sa religion, détrompé du faste de cette grandeur ottomane qu'il avait accrue par ses armes, voulut profiter du calme dont jouissait son empire pour goûter lui-même le repos de la solitude. Il abdiqua, et, laissant la couronne au jeune Mehmet II, son fils, il se retira à Magnésie, où, à peine âgé de 40 ans, il partageait la société des derviches et leurs austérités. 

Bataille de Varna
Cependant Ladislas ayant, à l'instigation du cardinal Julien Cesarini), légat du pape, recommencé les hostilités, Murat sortit de sa retraite ; il attaqua les chrétiens à Varna, en 1444. On dit qu'au milieu de la mêlée il tira de son sein le traité conclu naguère, le fit attacher au bout d'une lance et porter dans les rangs. La victoire paraissait incertaine Ladislas s'élance jusqu'au sultan et le combat corps à corps; Murat perce le cheval de son ennemi le roi de Hongrie tombe, et sa tête, coupée par les janissaires, est montrée à ses soldats, dont la plus grande partie sont taillés en pièces ou fait prisonniers. Murat fit mettre cette tête dans un vase rempli de miel, pour être envoyée à Bursa, et conservée soit comme trophée de sa victoire, soit comme exemple propre à contenir par la terreur la fidélité chancelante de ses vassaux. II fit enterrer le corps du prince dans le champ de bataille, et lui rendit les honneurs ulitaires. Le cardinal Julien et deux évêques qui avaient partagé son opinion restèrent parmi les morts, payant ainsi de leur sang le fatal conseil dont Ladislas était victime. Remarquons toutefois que Ladislas ayant signé la trêve sans le consentement de ses alliés, on pouvait contester avec quelque vraisemblance la validite de ce traité, qui violait des engagements antérieurs ; aussi Cogiat Effendi, historien turc estimé des musulmans, ne parle ni de la mauvaise foi des Hongrois ni de la circonstance du traité élevé au ciel par le sultan pendant le combat; il se borne à mettre dans la bouche de Murat une courte prière adressée à l'être suprême pour qu'il daigne jeter par terre le drapeau de l'infidélité et exterminer le roi de Hongrie, auquel il donne dans cette prière le nom d'infâme païen. Chose singulière le vainqueur abdiqua de nouveau, et retourna dans sa solitude. 

Retour sur le trône
Mais, deux ans après, il en fut tiré pour la seconde fois, les janissaires se prévalant de l'extrême jeunesse de son fils, osèrent se révolter et ravager Edrine ; Murat n'eut qu'à se montrer pour voir à ses pieds les séditieux. Un autre rival, non moins redoutable qu'Huniade, le célèbre Scanderberg, avait soulevé l'Épire il ne put résister longtemps aux armes du sultan, et fut poursuivi en Albanie les Épirotes n'eurent que le choix de subir la mort ou d'embrasser la religion musulmane. Une nouvelle invasion des Hongrois appela vers le Danube l'infatigable Murat II ; qui joignit ses ennemis dans cette même plaine de Kosovo où Murat Ier avait péri victorieux. Après plusieurs actions sanglantes, le sultan regagna Andrinople, ne songeant plus à résigner le pouvoir. Une preuve de plus de l'extrême avilissement où l'empire d'Orient était plongé, c'est qu'à la mort de Jean Paléologue II, lorsque Constantin Dragosès, l'un de ses trois fils, fut reconnu pour son successeur, afin de mieux assurer la couronne sur la tête de ce prince, on crut devoir faire approuver son élévation par Murat. L'historien Phrantzès fut chargé d'aller à Edirne lui demander son agrément. Flatté de cette déférence, le sultan accueillit Phrantzès avec distinction, et le renvoya comblé de présents. Murat succomba, en 1451, à une attaque d'apoplexie, d'autres disent aux suites d'une mélancolie causée par le chagrin de n'avoir pu reprendre à Scanderberg la ville de Croie, en Albanie. Il était âgé de 49 ans, et en avait régné 29. Murat II est au rang des plus grands princes de l'empire ottoman. S'il échoua devant Constantinople, il en ouvrit la route à son successeur, Mehmet II, moins modéré, aussi habile et plus heureux que son père. Tv. 

extrait de l'Encyclopédie du dix-neuvième siècle : répertoire universel des sciences, des lettres et des arts, avec la biographie de tous les hommes célèbres, 1837 

A lire, la biographie plus complète par Jouannin (1840) : SULTAN-MURAD-KHAN, vulgairement AMURAT II

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