Où l'on découvre le prestige du Français en Turquie à la fin du XIXe siècle.
Turquie. - Il en est, en Turquie, de la vie littéraire un peu comme de la question financière : tout souffre d'une longue anémie. Une foule d'ouvrages classiques, la plupart médiocres, quelques rééditions ou adaptations plus ou moins heureuses des livres liturgiques, deux ou trois traductions de romans français en vogue : tel est le bilan général de la bibliographie, en pays turc, depuis un ou deux ans. On n'a point assurément cessé d'étudier, ni surtout de disserter longuement dans les syllogues ou autres associations littéraires ; mais le plus grand nombre de ces doctes dissertations ne voient pas autrement le jour. Il y a pourtant des exceptions. La plus remarquable, sinon la plus digne d'arrêter le lecteur, est la publication en cours des Mystères de Péra, par Pierre Lora. Ce roman, qui aura, à en juger par le début, de vastes proportions, se publie, deux fois par semaine, par fascicules de seize pages, au prix d'une piastre chacun. Le nom de l'auteur, la langue de l'ouvrage, tout semble révéler, sous le pseudonyme de Pierre Lora, un de nos compatriotes ; mais ce Français n'est autre qu'un Hellène des plus distingués de Constantinople. D'ailleurs, une douzaine de fascicules ont seuls paru, et on ne peut encore porter de jugement sur l'œuvre entière. Nous comptons bien cependant avoir à signaler dans cette œuvre autre chose qu'une simple adaptation, pour le public français, des "Apokruphô toû Peran" datant d'une dizaine d'années.
extrait de Polybiblion, revue de bibliographie universelle, 1897, page 286
Ce texte a été traduit en judéo-espagnol dans le revue "La Epoka" :
Los misteryos de Pera, Jak Loria, Shemuel Saadi Halevi Ashkenazi (trad. du français), La Epoka (imp.), 1e partie, 1er vol. Salonique, 1910 (251 p.).
Cité dans Gaëlle Collin & Michael Studemund-Halévy, "Le fonds de livres judéo-espagnols des Archives Centrales d’État à Sofia. Description et catalogue"