IBRAHIM, sultan ou empereur des Turcs, frère de Murat IV, resté seul rejeton de la tige impériale, fut proclamé empereur l'an de l'hégire 1049 (ou 1640). Ce jeune prince avait vingt-trois ans ; mais pour le dérober aux soupçons et à la fureur de son frère, sa mère, la sultane Kiosun, lui avait conseillé de contrefaire l'imbécile. Ibrahim, sur le trône, prouva bientôt qu'il était plus cruel, plus injuste et plus tyrannique qu'insensé. Sous un aussi indigne maître, la nation ottomane brilla cependant de quelque éclat guerrier. Le siège d'Azof fut entrepris en 1641 ; et sur une insulte faite au pavillon musulman, les armes d'Ibrahim se tournèrent contre les Vénitiens, et la guerre de Candie commença. Cependant l'odieux sultan se livrait, au fond de son sérail à tous les excès de la débauche et de la brutalité. Il n'épargna pas même la fille du mufti, qu'il fit enlever, et qu'il renvoya ensuite à son père avec mépris. Cet attentat fut le dernier qu'il commit avec impunité. Le chef de la loi unit son injure particulière à la vengeance publique.
Tous les ordres de l'empire se soulevèrent contre Ibrahim ; sa mère elle-même entra dans la conspiration : on le força de descendre du trône ottoman, qu'il souillait par d'indignes excès. Il retourna dans l'appartement qu'il occupait avant de régner : mais sa vie ne fut pas longtemps respectée ; et au bout de quelques jours qu'il passa dans la fureur et le désespoir, il fut étranglé secrètement. Son règne, ou plutôt le cours de ses cruautés et de ses vices avait été de neuf années, et se termina par une mort digne récompense de sa vie, l'an de l'hégire 1059 (18 août 1649). S-Y.
Notice extraite de la Biographie universelle, ancienne et moderne..., Michaud, 1825
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