Catégorie : Textes et extraits de textes
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Extraits de ce texte très important traduit par Pavet de Courteille.

 

Quelques notes extraites de la préface
Dans le journal d'Antoine Galland, le célèbre traducteur des Mille et une nuits, on lit : "Jeudy 14 janvier. Je fis marché pour Son Exc. (M. de Nointel) d'un livre intitulé "Les merveilles des créatures", écrit en vieux caractères kiufi, avec soixante-six figures représentant diverses actions fabuleuses de Mahomet pour l'établissement de sa pernicieuse doctrine, comme son élévation au ciel, sa descente aux enfers, etc ; il fut acheté vingt-cinq piastres."
Ce manuscrit fut cédé ou offert à Colbert par Nointel. Colbert demanda à Petis de la Croix d'en rédiger une notice, mais celui-ci n'arriva pas à le déchiffrer, pensant avoir entre ses mains un specimen d'une ancienne écriture arabe.
Ensuite le manuscrit passa dans la bibliothèque du Roi. Des copies furent diffusées en Orient pour essayer d'identifier l'écriture. Les Fourmont y virent une écriture "tartare niuchi", c'est-à-dire mandchoue, ce qui constitua un progrès.
C'est Abel Rémusat qui le premier parvint à déchiffrer des fragments du manuscrit ouïgour et en parla dans ses Recherches sur les langues tartares.
Jaubert donna dans ses Eléments de la grammaire turke des extraits de ce texte, mais commit beaucoup d'erreurs.
Ce travail se révéla cependant très utile pour notre traducteur.

Les manuscrits ouïgours sont rares et Pavet de Courteille n'en dénombre que cinq ou six dans les bibliothèques européennes.
Celui du Miradj est daté par ces mots :
"Ici finit le récit des gestes et paroles des docteurs et des saints, consignés dans le tezkereh, à la date du dix du mois de Djemâdi-ul-âkhir de l'année du Cheval huit cent quarante à Hérat, moi, Mélik Bakhchi, de Hérat, j'ai écrit."
Ce qui correspond à l'an 1436-1437 du calendrier chrétien.

Ce volume est composé de 264 feuillets in-folio et contient deux ouvrages.
- folios 1 à 69 : Miradj ou récit de l'Ascension de Mahomet dont nous donnons un extrait. Le titre exact est "Comme quoi le Prophète (sur lui soit le salut !) est allé au mirâdj".  Ce récit est accompagné de miniatures avec une légende en turc. Il est traduit de l'arabe.
- folios suivants : Le Tezkereh-i-evliâ ou Mémorial des saints avec Soixante-douze médaillons. C'est une morale en action avec de nombreuses anecdotes traduite du persan de Ferid-eddin Mohammed ben Ibrahim Nachabouri dit Attar, mort en 1229-1230.

La lecture du manuscrit ouïgour n'est pas facile à cause de l'écriture bien adaptée au Turc, mais mal adaptée aux nombreux mots persans et à arabes utilisés par l'auteur.

Comme les aventures du Prophète dans le quatrième ciel manque à ce manuscrit, Pavet ajoute deux fragments extraits de deux autres manuscrits de la Bibliothèque nationale.
Les neuf derniers extraits, d'inspiration persane mais de langue turque, sont tirés d'un autre manuscrit ouïgour du XVe siècle dont l'auteur est Mir-Haïder.


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COMME QUOI LE PROPHÈTE (QUE SUR LUI SOIT LE SALUT!) A FAIT SON ASCENSION AU CIEL.

Actions de grâce et louanges à ce tout puissant qui n'aura pas de fin, qui a créé et dispose les dix-huit mille mondes, lui qui n'a pas d'associé, l'unique, l'existant par excellence, le souverain Seigneur, le Dieu très haut, que sa gloire brille à tout jamais, que son saint nom soit sanctifié ! Il n'y a pas d'autre Dieu que lui. Cent mille prières et bénédictions sur l'Ami du Dieu très haut, le Chef des cent vingt-quatre mille prophètes, Mohammed l'Envoyé de Dieu ! que les grâces célestes tombent en abondance sur les enfants et les quatre compagnons de l'Envoyé de Dieu (sur lui soit le salut!). Daigne le Seigneur se complaire en eux tous!
Or, il faut que vous sachiez que le titre du présent ouvrage est Le livre de l'ascension. Nous l'avons traduit en langue turke du livre connu sous le nom de La voie des paradis,
désirant qu'au grand nombre de lecteurs pût en tirer profit. Maintenant qu'il se trouve être complètement écrit, par la grâce de Dieu, nous espérons qu'il charmera les yeux de l'intelligence des créatures.
Dans son livre intitule Les Fanaux Imam Bagavi (que la miséricorde divine soit deux fois sur lui!) a rapporté une tradition arabe dont le sens est le suivant - « Enis Ibn Malek raconte d'après le Prophète que, dans la nuit de l'ascension, Gabriel vint amenant pour moi un Borak tout selle et bride. Le Prophète (que sur lui soit le salut!) se disposant à le monter, Borak s'était montre récalcitrant ; sur quoi Gabriel avait dit : «O Borak, jamais n'est monté sur toi un plus illustre devant Dieu que Mohammed. » A ces paroles Borak sua et sa sueur commença à couler. »
En outre un des compagnons du Prophète nommé Malik fait le récit suivant d'après Oumm Hani, soeur d'Ali. Celle-ci disait donc «qu'une nuit, le Prophète (sur lui soit le salut!) logeait dans notre maison. Au matin il se leva et nous dit : "Cette nuit il m'est arrivé d'étranges aventures." - Lesquelles, Ô Mohammed?, lui demandâmes-nous - "Je vais vous les raconter. Ecoutez-moi. Sachez donc, ajouta-t-il, que cette nuit, Gabriel (sur lui soit le salut!) et Mikaël, accompagnés chacun de soixante-dix mille anges, se sont présentés devant moi, menant avec eux un animal appelé Borak, sellé et bridé. Plus petit qu'un mulet, plus grand qu'un âne, sa face était comme celle d'un individu appartenant à l'espèce humaine. Par la queue et les sabots il tenait de la vache. (Il est dit dans un autre livre que sa queue et ses pieds ressemblaient à ceux du chameau.) Il avait la croupe du cheval et portait une selle d'émeraude verte, un harnais de perles et des étriers de turquoise. Gabriel s'avançant le premier me dit : "O Mohammed le Dieu très haut qui, te comblant de ses dons, t'a accordé d'innombrables faveurs, a décrété que tu monterais au ciel cette nuit pour y contempler les oeuvres de sa toute puissance et y recevoir les grâces dont il veut t'honorer." A peine eus-je entendu ces paroles, continua le Prophète, que je me levai pour faire mes ablutions. Gabriel m'ayant présenté dans une aiguière d'hyacinthe rouge de l'eau du Kaoucer qui coule dans le paradis, je fis mes ablutions. Gabriel versa sur ses ailes l'eau dont je m'étais servi. - "Pourquoi agis-tu ainsi?" lui dis-je. "C'est, me répondit-il, pour que le Dieu très haut ne me jette pas au feu de l'enfer au jour de la résurrection" - Ensuite à ma sortie de la maison, se tenaient Mikaël conduisant Borak par la bride, plus d'autres anges portant soixante-dix mille étendards lumineux à côté de chacun desquels étaient sept divisions d'anges. Tous, en me voyant, me firent un salut, auquel je répondis. Ensuite je montai sur Borak. Lorsque je le faisais marcher sur terre, un de ses pas devançait l'autre d'aussi loin que l'oeil pouvait atteindre. Si je tournais la bride dans la direction du ciel, il s'élevait dans les airs comme un oiseau. Nous nous rendimes tous ensemble à la Maison sainte (Jérusalem) et nous entrâmes dans la mosquée el-aksa. Je vis là tous les prophètes ayant à leur tête Ibrahim, Mouça et Iça. S'étant avancés ils me donnèrent le salut et s'écrièrent : "O toi que le Dieu très haut a comblé de ses dons, réjouis-toi ; car cette nuit, tout ce que tu demanderas au Seigneur il te
l'accordera. " Ensuite, Gabriel fit l'appel à la prière. Ibrahim, le prophète me dit : "O Mohammed, faites les fonctions d'imam; nous devons faire la prière sous votre direction." Alors je remplis les fonctions d'imam et nous fîmes tous la prière. Aussitôt après j'appelai les bénédictions de Dieu sur mes fidèles; tous les prophètes, élevant les mains vers le ciel, dirent : "Amen!"
Alors Gabriel, s'adressant à moi : «O Mohammed, lève-toi, il faut continuer notre route.» Je me levai et, portant les yeux devant moi, je vis un escalier de lumière, reposant sur la terre et aboutissant au ciel. Gabriel me dit : "O Mohammed, monte cet escalier. " Pour moi, tout en prononçant l'invocation au nom de Dieu clément et miséricordieux et beaucoup d'autres encore, je montai cet escalier et j'arrivai sans peine tout près du ciel. Là je vis une mer si immense que personne n'en connaissait l'étendue, excepté le seigneur très haut. - "O Gabriel, dis-je, quelle est cette mer ?" - "C'est, me dit-il, celle que l'on nomme La mer de Kaoucer ; elle se tient dans l'espace par la toute-puissance divine et personne autre que le Seigneur très haut n'en connait l'étendue."
Quand nous eûmes dépassé cette mer et poursuivi notre route, nous parvînmes par l'ordre de Dieu jusqu'au premier ciel. Je vis qu'il était fait d'émail couleur de turquoise, avec une épaisseur de cinq cents années de route. Gabriel frappa à la porte et n'eut pas plus tôt appelé l'ange chargé de la garde de cette porte que celui-ci demanda : "Qui es-tu?" - "Gabriel, ayant avec moi Mohammed." - "Apôtre de Dieu, reprit l'ange, le temps de ta venue est-il donc arrivé?"
- Et, ouvrant la porte du ciel avec de grandes démonstrations de joie, il me donna un salut que je lui rendis; puis il ajouta : "Sois le bienvenu, Mohammed, entre, honore de ta présence le monde céleste." - J'entrai donc et j'aperçus sept divisions d'anges prêts à recevoir les commandements de celui qui gardait la porte et qui tous me donnèrent le salut. Là je vis un personnage qui m'était inconnu.
"C'est Adam le prophète, me dit Gabriel, salue-le." J'allai lui donner le salut qu'il me rendit, en me disant:
"Sois le bienvenu, Mohammed, tu es arrivé a propos, que la prospérité te suive toujours!" - Ensuite je vis qu'Adam (sur lui soit le salut!) jetait des regards à sa droite, en souriant d'un air satisfait ; puis regardait à sa gauche, devenait soucieux et pleurait. - "Que fait donc Adam ?" demandai-je à Gabriel. - "A la droite d'Adam, me répondit-il, se trouvent les âmes des prophètes, des saints et des bons croyants. En les contemplant, il a le coeur content et sourit. A sa gauche, au contraire, sont les âmes des infidèles, des pervers et des incrédules. Leur vue le rend triste et il pleure." - Je passai outre et je vis un coq blanc, la tête sous le arch (trône de Dieu), les pattes repliées  sur la terre. - « Quel est ce coq?» demandai-je à Gabriel. - «C'est, me dit-il, un ange qui compte les heures de la unit et du jour. Quand vient l'heure de la prière, il appelle et récite le tesbih."  En entendant sa voix, les coqs qui sont sur la terre appellent à leur tour et récitent le tesbih." - Plus loin, je vis un ange moitié feu et moitié neige. - "Quel est cet ange?" demandai-je à Gabriel. - "C'est l'ange dont la voix est si retentissante quand il récite le tesbih que les hommes disent il tonne." - Il avait deux tesbih dans ses mains. Plus loin était une mer blanche - Quelle est  cette mer?" - demandai-je? - "C'est, me dit Gabriel, celle que l'on nomme la mer de la Vie."
Nous poussâmes en avant et nous parvînmes au second ciel. Je vis qu'il était de perles blanches. Son épaisseur était de cinq cents années de chemin. Gabriel, ayant frappé à la porte : "Qui es-tu?" demanda une voix. - "Je suis Gabriel; avec moi est Mohammed, l'Envoyé de Dieu », répondit-îl. cet ange, rempli de joie, ouvrit la porte dit ciel. Nous entrâmes et saluâmes l'ange qui nous rendit notre salut et dit : O Mohammed, réjouis-toi de toutes les grâces que le seigneur très haut va t'accorder cette nuit." - Vingt divisions d'anges prêts à recevoir les ordres de celui-ci se tenaient eu rangs autour de nous.
Tous nous donnèrent le salut. Plus loin j'arrivai auprès d'un ange gigantesque. - «Quel est cet ange ? " demandai-je. - «C'est celui qui règle les parts de toutes les créatures.» Plus loin je vis un ange à soixante-dix têtes et qui plus est ayant soixante-dix langues à chacune de ses têtes. Avec chacune de ses langues il récitait soixante-dix espèces de tesbih. Ayant dépassé cet endroit, je vis deux personnages. - «Qui sont-ils?, demandai-je. - «L'un, me dit Gabriel, est Yahia le prophète, l'autre est Zakaria le prophète. " - Je les saluai. Eux me dirent: « O Mohammed, sois le bienvenu! Tu as honoré de ta présence le monde céleste. Puissent les dons du Dieu très haut te faire prospérer." - Ayant passé outre, je vis mie mer blanche sur le rivage de laquelle une multitude d'anges récitaient le tesbih
Plus loin, nous parvînmes au troisième ciel. Gabriel, frappant à la porte, n'eut pas plutôt «appelé que l'ange qui gardait la porte du ciel demanda : "Qui es-tu?"- "Je suis Gabriel , et avec moi est Mohammed. " - Je vis que ce ciel était d'hyacinthe rouge. Alors l'ange me dit : "O Mohammed, sois honoré des dons du Dieu très haut ! "-
Il y avait là trente divisions d'archanges sous les ordres de cet ange et de plus trente mille anges étaient prêts à obéir à chacun des archanges. Tous me firent un salut que je leur rendis puis ils firent des voeux pour moi. Ayant passé outre, je vis dans un lieu plein de delices deux personnages. Le visage de l'un d'eux était arrondi comme la pleine lune. - «Quels sont ces personnages demandai-je ? - "Ce sont, me dit Gabriel, Yakoub le prophète et Youçouf le prophète." - J'allai leur faire un salut qu'ils me rendirent, en disant : "O Mohammed, sois le bienvenu ! Le Seigneur nous avait promis qu'îl nous ferait voir Mohammed ; cent mille grâces lui soient rendues de ce que nous avons contemplé ta face bénie! Tout ce que tu lui demanderas dans cette nuit, il te l'accordera." S'étant éloigné d'eux, j'aperçus deux autres personnages. Je questionnai Gabriel qui nie dit : "L'un est Daoud le prophète, l'autre est Suleïman le prophète." Je les saluai ; ils me rendirent le salut et me dirent : "O Mohammed, rêjouis-toi des dons du Seigneur et ne nous oublie pas." - Puis ils ajoutèrent : " Grâce à Dieu, nous avons vu ta face bien heureuse! " - Et ils firent des voeux pour moi. Passant outre, je vis sur le rivage d'une vaste mer un ange gigantesque assis sur un siège. Il avait soixante-dix têtes. Une multitude d'anges, occupant des sièges, se tenaient auprès de lui. Tous récitaient le tesbih.
Plus loin nous arrivâmes au quatrième ciel. Gabriel frappa à la porte et appela. L'ange qui la gardait l'ouvrit tout joyeux et dit en me saluant : " Sois le bienvenu, ô Mohammed, sois honoré des dons du Dieu très haut. "
Allant plus loin, nous arrivâmes an cinquième ciel qui était fait d'or. Lorsque Gabriel eut frappé à la porte et parlé, l'ange, tout joyeux, ouvrit et me donna le salut en disant : "Sois le bienvenu, ô Mohammed tu vas être honoré des dons du seigneur.» Et il lit des voeux pour moi. Plus loin j'aperçus ensemble Ismaïl le prophète, lshak le prophète, Haroun le prophète, Loth le prophète. Je les saluai. Eux me dirent : "O Mohammed, quoi que tu demandes cette nuit, Dieu te l'accordera, sans en rien excepter; demande lui le salut des âmes de tous ceux qui suivent ta loi." - Poussant plus loin, j'arrivais à une mer de feu. "Au jour de la résurrection, me dit Gabriel, on jettera cette mer de feu dans l'enfer, et ceux qui habitent l'enfer seront tourmentés par ce feu."
Nous dépassâmes ce lieu et parvînmes au sixième ciel qui était fait de perles. Gabriel frappa à la porte. L'ange qui en était le gardien l'ouvrit, me salua et me dit : "O Mohammed, sois le bienvenu; tu nous combles de joie en venant visiter le monde céleste ; sois comblé des grâces du Seigneur! » Et il appela sur moi les bénédictions de Dieu. Soixante divisions d'anges, se tenant à ses côtés, récitaient le tesbih. Plus loin je vis un keuchk sur lequel se tenait un personnage tout velu, entouré d'une grande multitude.
- "Qui est-ce?" demandai-je. - "C'est Mouça le prophète (sur lui soit le salut !) me dit Gabriel. - J'allai à lui et le saluai. Il me salua à son tour et me dit : "O Mohammed, sois le bienvenu, heureuse ton arrivée!"
"Marche, me dit Gabriel, monte plus haut." - En ce moment, Mouça se mit à pleurer. - "Pourquoi pleures-tu ?" lui dit Gabriel. "Hélas! je m'imaginais que ma place, que mon rang étaient au-dessus île tous; et voilà que Mohammed venant après moi, me dépasse de beaucoup; ses sectateurs seront plus nombreux que les miens et entreront avant eux dans le paradis." - Alors une parole auguste du Dieu très haut s'adressa à Mouça en ces termes : "O Mouça, je t'ai rendu illustre entre tous en te parlant face a face; je t'ai délivré de la malice de tes ennemis; pourquoi ne pas me rendre des actions de grâce pour les dons que tu as reçus de moi ?" - Je passai outre et je vis Nouh le prophète et Idris le prophète. Je leur adressai un salut qu'ils me rendirent en me comblant de bénédictions : «Sois le bienvenu, ô Mohammed », disaient-ils avec des démonstrations de joie.
Poursuivant notre route, nous arrivâmes au septième ciel. Gabriel, passant en avant, frappa à la porte et appela. L'ange qui gardait cette porte l'ouvrit joyeux et nous entrâmes. Alors il me dit : «Sois le bienvenu, ô Mohammed qui nous honores de ta visite ! Puisses-tu être honoré à ton tour! " - Il y avait là soixante-dix divisions d'archanges sous le commandement de l'ange qui gardait ce ciel fait de lumière. Il n'y restait pas le moindre espace libre ; les anges occupaient toute la place. Nous franchîmes ce lieu et parvînmes à un vaste keuchk, devant lequel était installée une grande chaire démeraude verte. Un personnage à barbe blanche, assis sur cette chaire, s'appuyait sur le keuchk. - "Qui est-il?" demandai-je ? - «C'est, me dit Gabriel, ton ancêtre Ibrahim le prophète. " J'allai le saluer. Il me rendit le salut, en me disant : « O prophète par excellence sois le bienvenu ! Dieu bénisse ton arrivée! " - Gabriel reprit : "Voilà ta résidence et celle de tous ceux qui suivent ta voie." - Puis il ajouta : «Entré dans cette maison et visite la, car chaque jour soixante-dix mille anges viennent la visiter." - Je vis encore une troupe de créatures, la moitié en tunique blanche, la moitié en tunique rayée de blanc et de noir. - « Ce sont ceux qui suivent ta voie, me dit Gabriel. Puis, s'adressant aux porteurs de tuniques blanches : «Vous aussi, entrez avec votre prophète." - Et il leur permit d'entrer; mais il ne le permit pas aux porteurs de tuniques rayées de blanc et de noir. - Passant outre, je vis une vaste mer, toute noire. A son aspect, mon oeil fût aussitôt comme entouré de ténèbres. Dans cette mer, j'aperçus une foule innombrable d'anges. Je questionnai Gabriel : "Pourquoi l'eau de cette mer est-elle noire ? " - "Personne autre que le Seigneur très haut ne connait la nature de cette mer", répondit Gabriel. Sur le rivage, je vis un ange gigantesque, touchant de sa tête le dessous du arch, les pieds reposant sur le sol, capable d'engloutir dans sa bouche les sept étages de la terre. Plus loin je vis un autre ange aux propositions colossales ayant soixante-dix têtes, aussi grand que ce bas monde tout entier.

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Autre extrait de ce texte très important.

Extrait de la Grammaire turque de Davids, 1836.

En sortant de là, je vis un kiosk ; et dans un des salons de ce kiosk, je vis une personne qui portait une longue robe. Elle était entourée de beaucoup d'esclaves. Je dis, - Qui est cette personne ? Gabriel répondit, "C'est le prophète Moïse : que la paix soit avec lui!" Je m'approchai de lui, et le saluai : Moïse m'ayant rendu mon salut, me parla ainsi: "O Mohammed ! sois le bien venu ; tu as apporté la joie." Alors Gabriel me dit: "Allons : montons encore plus haut!"