Catégorie : Sultans
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Le Grand Seigneur (i.e., the s... Digital ID: 1239141. New York Public Library

Mahmut II, sultan des Ottomans, trentième souverain de la dynastie d'Osman naquit à Constantinople le 14 du mois de Ramazan de l'an 1199 de l'hégire (20 juillet 1785). Il était fils du sultan Abdul-Hamid Ier, suivant une tradition assez peu fondée, d'une dame noble née en Provence, prise par des corsaires algériens, vendue comme esclave et placée dans le harem impérial. Il succéda à son frère ainé Mustafa IV, et monta sur le trône à la suite d'une révolution, le 28 juillet 1808.

Formation
Mahmut avait passé une partie de sa vie dans le sérail, au milieu des eunuques, suivant l'usage jusqu'alors presque généralement suivi par les sultans ottomans, de faire périr ou d'enfermer ceux de leurs proches dans lesquels ils pouvaient craindre un compétiteur. Cette captivité n'avait pas abattu l'énergie naturelle de Mahmut. Ce prince avait été pendant quelque temps enfermé avec son cousin, le sultan Sélim III, précipité du trône par les janissaires. Les deux princes se lièrent d'une étroite amitié, et il est permis de croire que ce fut dans les longs entretiens qu'ils avaient ensemble que Mahmut puisa sa haine contre les Janissaires et l'idée d'établir les réformes qui, repoussées par les hommes intéressés à la conservation des abus, avaient amené la chute de Sélim.

Prise du pouvoir

Lorsque Mahmut monta sur le trône, l'empire ottoman se trouvait dans la position la plus précaire. A Constantinople les soulèvements continuels des janissaires paralysaient le gouvernement. Ces soldats indisciplinés étaient partagés en deux factions, dont l'une soutenait Mustafa et l'autre Sélim. Mahmut n'avait aucun moyen de les faire rentrer dans le devoir, car les pachas s'étaient rendus indépendants et l'empire épuisé par ses longues luttes avec la Russie et par la guerre qu'il venait de soutenir en Égypte contre la France, ne possédait ni troupes ni argent. Mahmut comprit qu'il n'avait qu'à temporiser. Il dissimula ses projets, nomma grand vizir Mustafa-Pacha, surnommé Baïraldar ou Baïrakdar, c'est-à-dire porte-étendard, homme ambitieux, énergique et partisan des réformes essayées par Sélim, auquel il laissa en réalité le souverain pouvoir. Mustafa entreprit plusieurs réformes dans l'administration et se montra sévère envers les janissaires et les pachas. Il obtint d'abord quelques succès; mais bientôt tous les mécontents s'écant ligués con tre lui, une révolution éclata le 14 novembre 1808 et Mustafa fut brûlé dans son palais, auquel les révoltés avaient mis le feu. Ils voulurent aussi incendier le sérail et proclamer Mustafa IV mais celui-ci fut étranglé, suivant les uns, par ordre de son frère Mahmut, et suivant les autres, par l'ordre de Mustafa Baïraklar ; cette dernière version paraît peu probable. Pendant cette révolution, tout un quartier de Constantinople avait été réduit en cendres.
Mahmut triompha, et ces événements lamentables tournèrent même au profit de sa politique. Il se trouvait à la fois débarrassé de son frère Mustafa IV, compétiteur dangereux, et de Mustafa Baïraktar devenu véritable souverain sous le nom de grand vizir. D'un autre côté, quelques-unes des réformes que ce vizir avait payées de la vie subsistaient sans que Mahmut en fût responsable aux yeux des mécontents. Son premier acte d'autorité fut le massacre du fils de son frère Mustafa IV, et quatre femmes de ce prince que l'on croyait enceintes furent précipitées dans le Bosphore.Ces crimes monstrueux firent de lui le seul rejeton de la famille impériale. N'ayant plus à craindre de rivaux, il commença, quoique avec une extrême prudence, à préparer les voies pour introduire ses plans de réforme. La guerre qui recommença bientôt avec la Russie jeta l'empire ottoman dans de nouveaux désastres. Cependant, forcée de rappeler une partie de ses troupes pour résister à la France, la Russie signa à Bucarest, le 16 mai 1812, un traité de paix avec la Porte. Ce traité, favorable à la Russie qui gagnait plusieurs provinces et quelques positions militaires importantes, le fut également à Mahmut qui se serait bientôt trouvé dans l'impossibilité de prolonger la lutte. Il mit habilement à profit cette paix onéreuse, mais cependant utile pour réduire successivement à l'obéissance quelques-uns des pachas qui s'étaient déclarés indépendants. Parmi ces révoltés, se trouvait Ali, pacha de Janina, dont la résistance longue et habile amena plus tard le soulèvement et l'émancipation de la Grèce. La France, l'Angleterre et la Russie, mues par des sentiments divers s'entendirent cependant pour arracher la Grèce au joug ottoman. Mahmut avait su contraindre Méhémet-Ali, pacha d'Egypte, à lui envoyer sa flotte et ses troupes de terre. Toutefois, malgré ce renfort, il était manifeste que le sultan ne pouvait pas résister aux puissances chrétiennes coalisées. Les troupes ottomanes furent battues dans plusieurs rencontres, et le combat naval de Navarin anéantit la marine turque. Le 6 juillet 1827, Mahmut fut contraint d'accepter un traité qui garantissait l'indépendance de la Grèce.

Anénantissement des Janissaires
Nous devons retourner en arrière pour nous occuper des réformes introduites dans l'empire. Mahmut avait renoncé au turban pour adopter le costume européen ; il avait formé de nouveaux corps de troupes disciplinées à la manière des nations chrétiennes. Ces changements excitèrent un mécontentement profond, surtout parmi les janissaires. Le 15 juin 1826, les principaux chefs de cette milice se révoltèrent. Mahmut, qui avait pris ses mesures, fit mettre le feu aux casernes des janissaires, et on tira à mitraille sur les bâtiments en flammes. Le lendemain un hatti-schérif ou décret impérial prononçait la dissolution des janissaires et leur organisation sur de nouvelles bases. Six mille hommes environ avaient péri par la mitraille ou par le feu ; il en restait encore environ 15000 qui furent exilés en Asie où les suivirent bientôt 20000 scélérats et vagabonds chassés de Constantinople. La destruction des derviches Bektachis, intimement liés avec les janissaires, suivit de près celle de ces derniers. Les différents corps de troupes attachés aux janissaires ou intéressés à l'ancien ordre de choses furent supprimés, et une milice disciplinée a l'européenne les remplaça.

Nouvelles pertes territoriales
Telle était la situation de l'empire ottoman lorsque Mahmut, par un appel imprudent aux musulmans fidèles qu'il engageait à se préparer à la guerre sainte, attira sur son empire les armes de l'empereur Nicolas qui ne cherchait qu'un prétexte pour s'emparer de la Turquie. La campagne de 1829 fit perdre à Mahmut quelques-unes de ses plus belles provinces, et, sans l'intervention de la France et plus encore de l'Angleterre, l'empire ottoman formerait aujourd'hui une partie de l'empire russe. La paix fut signée à Andrinople le 2 septembre 1827.
Là ne s'arrêtèrent pas les échecs que Mahmut était destiné à essuyer. Méhémet-Ali, pacha d'Egypte, s'était révolté et envoyait une armée contre Constantinople. Le 21 décembre 1832, Ibrahim-Pacha, fils de Méhémet-Ali, mettait en fuite les troupes ottomanes à la bataille de Konya et forçait le sultan à conclure un traité aussi humiliant que désastreux. Mahmut voyait son empire déchiré par un vassal, et se trouvait lui-même sous la dépendance complète de la Russie [...] Il mourut dans la nuit du 30 juin au 1er juillet 1839. Il allait entrer dans sa cinquante-cinquième année.   Dubeux

extrait de l'Encyclopédie du dix-neuvième siècle : répertoire universel..., 1836-1853. Nous avons modernisé l'orthographe des noms propres et ajouté les intertitres.